Vers une représentation exacte de grandes quantités
Apprendre à compter est une étape très importante de l’apprentissage mathématique, en ce qu’il permet à l’enfant de d’aller au-delà des limites des précédents systèmes :
- le système numérique approximatif est capable de gérer les petites comme les grandes quantités, mais il perd en précision à mesure que les valeurs augmentent, rendant impossible l’estimation précise de grandes quantités
- le système de suivi des objets supporte la représentation exacte de petites quantités, mais est très vite limité (à environ 3).
En apprenant à compter, les enfants imposent des modifications majeures à leur système numérique approximatif, de manière à lui permettre de supporter la représentation exacte de grandes quantités.
L’ordre d’apprentissage du comptage
Les enfants apprennent généralement à réciter la séquence numérique (“Un, deux, trois…”) avant même d’en comprendre le sens de ces mots, et avant de comprendre que la routine du comptage peut être utilisée pour établir la cardinalité d’un ensemble. La signification des “noms de nombres” et les principes du comptage émergent lentement, entre 2 et 4 ans, et dans un ordre strictement établi :
- vers 2 ans, l’enfant apprend la signification du mot “un” (si on lui demande d’apporter “un” jouet, l’enfant en apportera un ; il peut cependant en apporter 0, 1, 2, 5, si on lui demande d’en apporter 2).
- le même enfant aura besoin de plusieurs mois ensuite pour saisir le sens du mot “deux”, et d’encore plusieurs mois pour comprendre “trois”
- au moment, environ, où l’enfant comprend le sens de “quatre” (à environ 4 ans), il découvre le principe du comptage et est alors capable d’apporter n’importe quelle quantité d’objets, sous réserve qu’il connaisse la séquence numérique jusqu’à ce nombre.
Les deux mécanismes du comptage
Deux mécanismes cruciaux sont impliqués dans le comptage :
Le premier est l’individualisation des objets : celle-ci, à cause de la capacité limitée du système de suivi des objets, nécessite de procéder de façon sérielle pour les ensembles de plus de 3 objets. Des chercheurs ont ainsi montré que le comptage n’est pas possible si l’on empêche les mouvements oculaires et/ou attentionnels (Oyama 1981).
Le second mécanisme est la mémoire de travail : elle permet de retenir le total provisoire et de lui intégrer successivement les nouveaux objets. Chez l’humain, elle recrute en particulier le système verbal. Des études chez le singe ont montré que les animaux étaient capables d’apprendre à associer des chiffres arabes à des nombres de points jusqu’à 9, mais pas au-delà. Le comptage est donc une activité propre à l’homme.
Compter sur les doigts
Dans la plupart des cultures, les enfants apprennent spontanément à utiliser leurs doigts pour compter : c’est une étape très utile du développement arithmétique. C’est notamment un outil efficace pour alléger la charge de la mémoire de travail, ce qui est particulièrement utile chez les jeunes enfants. Certaines études suggèrent une corrélation étroite entre la représentation des nombres sur les doigts et le traitement numérique.