Mon Cerveau à l'école

Quelques éléments de sciences cognitives pour les enseignants et les parents

  • Dyslexia International

    L’association Dyslexia International propose toute une série de ressources à destination des enseignants et des parents d’enfants dyslexiques.

    … et notamment des cours en français aussi bien par écrit qu’en vidéo.

  • Signes d’alerte de difficultés de langage

    Vous vous inquiétez car votre enfant dit peu de mots.

    La variabilité dans l’acquisition du langage est assez importante même au sein d’une même famille. Néanmoins si vous vous inquiétez, il y a peut-être anguille sous roche…. et vous pouvez consulter ce texte publié par le ministère français de la Santé des signes d’alerte de difficultés de langage ICI

    et télécharger cet inventaire des mots que les enfants de 12-18 et 24 mois produisent généralement (Inventaire de Mc Arthur, adaptation française de S. Kern, CNRS). Attention, cet inventaire est juste un indicateur qui doit être discuté avec un professionnel mais il peut vous aider à apprécier plus objectivement où en est votre enfant.

  • Les neurones de la lecture

    Les neurones de la lecture, un livre de Stanislas Dehaene publié aux Editions Odile Jacob

    Les neurones de la lecture

    Un livre de Stanislas Dehaene, publié aux Editions Odile Jacob.

    Ce livre vous aidera à comprendre, en détail, les nouvelles découvertes scientifiques sur le cerveau et la lecture. Comment fonctionne le cerveau d’un lecteur? Comment le cerveau se modifie-t-il au fil de l’apprentissage?

    Les Neurones de la lecture s’ouvre sur une énigme: comment notre cerveau de primate apprend-il à lire? Comment cette invention culturelle, trop récente pour avoir influencé notre évolution, trouve-t-elle sa place dans notre cortex?

    Voici qu’émerge une nouvelle science de la lecture. Tandis que l’imagerie cérébrale en révèle les circuits corticaux, la psychologie en dissèque les mécanismes. Ces résultats inédits conduisent  à une hypothèse scientifique nouvelle. Au cours de l’acquisition de la lecture, nos circuits neuronaux, conçus pour la reconnaissance des objets, doivent se recycler pour déchiffrer l’écriture – une reconversion lente, partielle, difficile, qui explique les échecs des enfants et suggère de nouvelles pistes pédagogiques.

    Qu’est-ce que la dyslexie ? Certaines méthodes d’enseignement de la lecture sont-elles meilleures que d’autres ? Pourquoi la méthode globale est-elle incompatible avec l’architecture de notre cerveau ? Utilise-t-on les mêmes aires cérébrales pour lire le français, le chinois ou l’hébreu ? La lecture subliminale existe-t-elle ? Autant de questions auxquelles Stanislas Dehaene, spécialiste de la psychologie et de l’imagerie cérébrale, apporte l’éclairage des avancées les plus récentes des neurosciences.

    Ce livre a été traduit dans de nombreuses langues:

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    Les neurones de la lecture

  • Les dys….

    La mise en place, à la fois souple et contrainte, d’une structure aussi complexe que le cerveau comporte inévitablement un risque d’accroc. Et de fait, environ 5 à 12 % des enfants d’une classe d’âge souffrent de déficits dans un domaine cognitif : dysphasie (troubles du langage oral), dyslexie (troubles de la lecture), dyscalculie (troubles du calcul), dyspraxie (troubles du mouvement), hyperactivité ou déficit de l’attention… Il ne s’agit pas là d’une nouvelle marotte des psychologues : le pourcentage de jeunes en difficulté lors des tests des Journées d’appel de préparation à la défense confirme la prévalence des problèmes d’apprentissage dans notre pays.

    En 2006 par exemple, sur les 800 000 jeunes testés, seuls 78,7 % lisaient efficacement. Pour le reste, 9,6 % étaient des lecteurs médiocres, 6,9 % avaient de faibles capacités et 4,8 % rencontraient des difficultés importantes. Ces pourcentages se répètent peu ou prou chaque année.

    Ces résultats recoupent ceux des évaluations nationales 2009 en primaire, où 73 % des enfants maîtrisaient la lecture, 18 % avaient des acquis fragiles et 9 % connaissaient des difficultés importantes. Dans une société de plus en plus technique, ces troubles d’apprentissage, longtemps méconnus, créent des difficultés scolaires compromettant l’avenir professionnel des enfants (D’après les enquêtes emplois 2007 de l’Insee, le chômage concerne 37 % des adultes sans diplôme contre 9 % des adultes ayant une formation supérieure). C’est pourquoi ils attirent de plus en plus l’attention des parents, éducateurs et médecins. 20% de la population en difficulté vis-à-vis de la lecture ne correspond évidemment pas stricto sensu aux troubles spécifiques des apprentissages définis dans les livres de médecine. Les catégories nosographiques peuvent en effet apparaître trop étroites par rapport aux difficultés rencontrées sur le terrain. Raison de plus pour comprendre comment le cerveau apprend, afin de développer de nouvelles pédagogies.

    Enfance et apprentissage

    Dans toutes les civilisations, les humains profitent des premières années de vie de leurs enfants pour enseigner, d’abord au sein de la famille puis à l’école. Nous prenons avantage – sans forcément le savoir – de l’importante plasticité neurale du jeune âge pour apprendre à parler, lire, compter, faire de la musique… Pourquoi est-ce si facile d’apprendre le piano ou une deuxième langue pendant l’enfance, alors que les adultes raisonnent plus profondément et manient des concepts autrement plus complexes que les enfants ? Pourquoi certains enfants pourtant intelligents sont-ils incapables de lire « papa » à 12 ans, ou de dire que si on enlève le premier son à « bras », il reste « ra » (à l’oral), ou ne « voient » pas que 25 est plus grand que 20 ? Ces difficultés peuvent persister à l’âge adulte : j’ai rencontré les deux derniers exemples chez des adultes, l’un chauffeur et l’autre docteur en histoire, sans problème autre que leur déficit tout à fait restreint à la parole ou aux nombres – déficit qui avait empoisonné toute leur scolarité.

    Génétique ?

    verre1La génétique contribue sans doute à la plupart de ces déficits. De nombreux gènes s’expriment dans le cerveau du fœtus, parfois pendant de courtes périodes et dans des régions spécifiques, dirigeant la multiplication et la migration des neurones et favorisant les bonnes connexions. entre ces cellules Ces gènes peuvent agir directement, ou réguler d’autres gènes, qui eux-mêmes agissent directement ou influent à leur tour sur d’autres gènes, créant des cascades compliquées d’interactions et nous comprenons encore très mal quelles sont les instructions génétiques qui permettent de construire un cerveau . Quoi qu’il en soit, un parent dyslexique a un risque sur deux d’avoir un enfant dyslexique. De nombreux gènes semblent liés à cette pathologie, mais tous ceux identifiés jusqu’ici interviennent dans la migration des neurones. Des études post mortem de patients dyslexiques ont d’ailleurs montré des amas de neurones ayant le plus souvent dépassé leur cible. Ces neurones mal placés n’effectuent donc pas correctement leur travail. Mais quel travail ? La relation entre ces anomalies corticales et le déficit cognitif reste difficile à établir, alors même que la dyslexie est le trouble développemental le plus étudié et le mieux connu.

    L’influence de l’environnement

    remplirverreLes gènes suffisent-ils pour expliquer la pathologie ? Évidemment non. L’environnement intervient de façon cruciale dans le développement cognitif. Par exemple, si un jumeau est dyslexique, son « vrai » jumeau ne le sera pas forcément, même s’il a un risque de dyslexie plus important qu’un autre membre de la fratrie ou qu’une personne sans parent dyslexique. Les troubles de lecture se rencontrent aussi plus fréquemment dans les milieux défavorisés. Si vous avez un vocabulaire pauvre ou si les livres ne sont pas familiers dans votre environnement, vous renoncerez plus vite devant la difficulté du déchiffrage et vous lirez moins. Or il en va de la lecture comme du tennis : moins vous vous exercez, moins vous progressez.

    Autre exemple d’influence du milieu sur l’apprentissage de la lecture : la nature « opaque » ou « transparente » de la langue. Les langues « opaques », comme l’anglais, ne sont pas régulières dans leur transcription de la parole. Contrairement à l’italien, langue « transparente » où chaque lettre correspond à un son et chaque son à une lettre, en anglais les mêmes lettres peuvent se lire de manière différente. Or cette opacité a un coût, même pour les enfants sans problème. À la fin du Cours Préparatoire (CP), les petits Italiens savent lire alors que les petits Anglais auront besoin de trois ans de plus pour atteindre le même niveau. Le français est une langue intermédiaire, beaucoup plus difficile à l’écriture (le son « o » peut s’écrire de multiples manières o, au, eau, aut…) qu’à la lecture (« eau » se lit toujours « o »). La prévalence de la dyslexie est donc, sans surprise, plus importante dans les pays anglophones.

    Au total, si le contexte génétique (le plus souvent lié à de multiples gènes) peut favoriser des difficultés d’apprentissage dans tel ou tel domaine, le milieu intervient également. Il peut amplifier ces difficultés en n’apportant pas le soutien nécessaire ou les corriger en exploitant les multiples voies d’apprentissage.

    Comment les repérer?

    Dans cette conférence donnée au collège de France, Michèle Mazeau donne des pistes pour repérer et aider ces enfants dans la classe.

    J’en profite pour conseiller les livres et conférences de Michèle Mazeau, la meilleure spécialiste en neuropsychologie de l’enfant. Ses livres sont plutôt techniques et pour les spécialistes mais dans un très récent livre, elle raconte son parcours et l’émergence de ce domaine en France.

    Mieux comprendre les DYS - de leur émergence aux neurosciences : Le parcours professionnel d'une pionnière, spécialiste de la neuropsychologie infantile
  • L’imagerie cérébrale et les dys…

    Dissipons tout d’abord un malentendu concernant la signification des résultats obtenus en imagerie. L’imagerie ne met pas en évidence des effets “biologiques”, présumés “fixés”. Elle présente l’état d’un cerveau, organe plastique par excellence, à un instant donné et cet état est tout autant le produit de son histoire biologique que celui de l’environnement culturel dans lequel il se situe. Ainsi illettrisme et dyslexie peuvent se traduire par les mêmes images. Pourtant les unes sont liées à la non fréquentation de l’école et les autres à des difficultés de l’apprentissage de la lecture. L’imagerie peut donc tout autant explorer les causes biologiques de la dyslexie que l’impact de telle ou telle stratégie éducative. Cette absence de spécificité crée d’ailleurs une difficulté dans l’interprétation des résultats lors de la comparaison d’un groupe pathologique et d’un groupe contrôle, puisque les différences observées peuvent être liées soit à la cause de la pathologie ou n’en être que la conséquence. Par exemple, si les dyslexiques n’activent pas la région de la forme visuelle des mots, est-ce dû à une mauvaise organisation de cette région occipitale qui serait à la source des difficultés de lecture ou à l’inverse est-ce l’automatisation de la reconnaissance des lettres dans cette région qui n’a pu se produire du fait d’un nombre insuffisant de textes lus? Cause ou conséquence, il est souvent difficile de séparer ces deux alternatives.

    Qu’avons-nous donc appris ces dernières années grâce à l’imagerie ?

    Le cerveau est dit “plastique”, c’est à dire qu’il peut se réorganiser. C’est une fantastique capacité de pouvoir s’autotransformer! Mais il y a des contraintes qu’il faut respecter. On ne peut pas tout apprendre n’importe comment. Il y a des stratégies qui marchent et d’autres qui ne marchent pas. Celles qui s’adaptent aux contraintes cérébrales sont plus efficaces que celles qui luttent contre nos tendances naturelles. Par exemple, reconnaitre des visages est évident pour un humain (difficile pour un ordinateur), multiplier des chiffres demande un effort alors que c’est une opération basique pour un ordinateur. Le but des neurosciences est donc de trouver les stratégies les plus efficaces pour telle ou telle tâche cognitive étant donné les caractéristiques cérébrales. La première étape est donc de comprendre comment l’enfant, ou l’adulte sans problème lit, parle, calcule et grâce au développement de l’imagerie cérébrale, la boite noire s’est ouverte.

    Voici les principaux changements qu'induit la lecture dans le cerveau.
    Voici les principaux changements qu’induit la lecture dans le cerveau.

    La dyslexie est la pathologie la plus étudiée et donc l’exemple le plus clair de ce que peut actuellement apporter l’imagerie. L’apprentissage de la lecture consiste à apprendre la correspondance entre une forme visuelle et le son qu’elle représente. Cet apprentissage modifie en profondeur les régions visuelles qui développent une réponse spécifique aux chaines de caractères fréquemment rencontrées pour le codage des sons de la langue. Cette région dite de la forme visuelle des mots se situe dans le gyrus fusiforme gauche (le cercle rouge le plus en avant en bas du cerveau sur la figure)  à des coordonnées étonnamment reproductibles à travers les individus d’une même langue mais aussi à travers différentes langues et écritures.

    Ceci peut paraître étonnant pour une activité culturelle mais cette reproductibilité est vraisemblablement liée à la relation privilégiée de cette région avec d’autres régions cérébrales cruciales, d’une part les régions visuelles qui codent les informations du centre de la vision (fovea) et d’autre part les régions du langage oral (en vert sur la figure). Cette activation spécifique aux mots s’établit rapidement puisque dans nos études, des enfants de fin de CP ont déjà développé cette réponse.

    La lecture modifie également profondément le réseau du langage oral car elle nécessite une prise de conscience analytique du langage parlé jusqu’à ses briques les plus élémentaires, les phonèmes. Bien que dès la naissance, les nourrissons discriminent les phonèmes de façon similaire aux adultes, la manipulation consciente de ces éléments ne devient efficace qu’au moment de l’apprentissage de la lecture comme le prouvent les mauvaises performances des illettrés dans des tâches où ils doivent les manipuler. Cette attention automatique aux phonémes produit une augmentation des activations dans la région du planum temporale (le point rouge en haut de la figure) lorsque des lecteurs (adultes et enfants) écoutent leur langue maternelle, par rapport à des non-lecteurs de même âge.

    Les différences entre langues opaques et transparentes sont visibles en imagerie (une langue est dite transparente quand les sons sont codés simplement et invariablement. Le prototype d’une langue transparent est l’italien, un son correspond à une lettre et réciproquement, le prototype d’une langue opaque est l’anglais où existe beaucoup d’irrégularité dans la correspondance sons/lettres). Les lecteurs anglophones recrutent beaucoup plus les régions de la production de la parole alors que les italiens activent plus une voie plus directe de stockage des sons de la parole. Pour déterminer la prononciation d’une suite de lettres, les anglophones sont obligés de recruter les aires frontales comme le font les jeunes lecteurs alors que cette étape n’est plus nécessaire dans une écriture régulière comme l’italien. On voit dans cet exemple comment différents environnements culturels peuvent recruter plus ou moins certaines aires cérébrales, mais pas n’importe lesquelles!

    Chez les dyslexiques, la région de la forme visuelle des mots s’active beaucoup moins lors de tâches de lecture que chez les normo-lecteurs de même âge, et ce quelle que soit la langue. Les dyslexiques montrent également moins d’activation dans les régions du langage oral et plusieurs études structurales montrent des anomalies dans la substance blanche à gauche  dans une région où passe un important faisceau linguistique, le faisceau arqué, reliant les différentes régions linguistiques. Ces résultats sont concordants avec le modèle actuel de la dyslexie qui attribue les difficultés de lecture à des problèmes de décodage des sons de la parole alors que l’hypoactivation de la région visuelle des mots ne serait qu’une conséquence de l’absence d’automatisation de la reconnaissance visuelle des mots. La difficulté à percevoir que /b/ et /d/ sont des sons différents empêche évidemment de leur assigner des lettres. D’ailleurs, pour des mots bien connus l’activation dans la région visuelle des mots est similaire chez des adultes normo-lecteurs et des mauvais lecteurs persistants. Mais ces derniers recrutent en plus la région préfrontale droite, suggérant qu’ils s’aident beaucoup plus de la mémoire que les normaux-lecteurs.

    Comme pour les différences entre lecteurs de différentes langues, il est donc possible de compenser des difficultés par l’utilisation de régions cérébrales supplémentaires. Ces observations témoignent donc des ressources dont disposent le cerveau, même en cas de difficultés, mais il faut dans ce cas de nouvelles stratégies. Par exemple, écrire la forme de la lettre en en disant le son et en la visualisant aide significativement l’apprentissage des correspondances sons-lettres chez l’enfant normo-lecteur (Gentaz, 2003).

    Chez les dyslexiques, nous avons observé en imagerie que ceux qui s’en sortaient le mieux étaient ceux qui présentaient le plus d’activation dans la région de la main lorsqu’ils entendaient de la parole suggérant que ces enfants utilisaient un codage manuel pour compenser leurs difficultés auditives. Cette stratégie, que ces enfants avaient sans doute découverte spontanément, pourrait être systématiquement et explicitement utilisée.

    Le succès de l’espèce humaine est basé sur son développement culturel, où chaque génération enseigne à la suivante. Ce succès évolutif repose sur le cerveau, fantastique machine à apprendre. Même nouveau-né, même dyslexique ou dyspraxique, ce cerveau apprend.

    Si la pédagogie habituelle n’est pas la bonne pour un enfant particulier, à nous de trouver une nouvelle solution, en s’appuyant sur d’autres compétences pour contourner la difficulté. Plus nous comprenons les mécanismes cérébraux, plus nous pourrons imaginer ces solutions. L’imagerie cérébrale devient alors un outil précis et précieux dans cette quête. Ces recherches en sont encore à leur début, car l’imagerie cérébrale est récente mais ces prochaines années devraient voir une dissection de plus en plus fine des mécanismes d’apprentissage et des suggestions pédagogiques pour éviter de laisser 20% de nos concitoyens sur le bord de la route (aux journées d’appel à la défense (2006) seulement 78% des jeunes adultes sont à l’aise avec la lecture!).

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  • Aider les dyslexiques en  e s p a ç a n t  les lettres

    Dans la rééducation de la dyslexie, l’un des défis consiste à aider les enfants à lire plus vite. En effet, même après la rééducation, les enfants dyslexiques restent souvent très lents en lecture. Cela crée un cercle vicieux: moins les enfants vont vite, moins ils lisent, et moins ils lisent, moins ils réapprennent à lire.

    Une étude récente de Marco Zorzi (Université de Padoue) et Johannes Ziegler (CNRS Aix-Marseille) suggère une solution. Le simple fait d’espacer les lettres, en ajoutant des blancs    e n t r e    c h a q u e   l e t t r e,  accélère immédiatement la vitesse de lecture. Les enfants dyslexiques italiens et français font presque deux fois moins d’erreurs, tout en lisant environ 14% plus vite. Les enfants qui lisent normalement, eux, ne bénéficient guère de cette manipulation.

    L’explication est simple: les mauvais lecteurs souffrent d’un phénomène d’ ‘encombrement’ (crowding en anglais). Lorsque les lettres sont trop proches les unes des autres, leur système visuel les mélange et ne parvient plus à les séparer. Avec l’apprentissage, le phénomène d’encombrement se réduit progressivement, à mesure que le cerveau code de mieux en mieux les lettres.

    Dans de nombreux logiciels, vous pouvez modifier vous-même l’espacement des caractères (par exemple dans Word: menu paragraphe, format, police, espacement = 3 pt ou plus).

    Selon les chercheurs, l’espacement des lettres soulage immédiatement les enfants dyslexiques, en leur permettant de lire mieux et plus vite. Il faut toutefois noter que les effets à long terme de cette méthode de lecture n’ont pas encore été étudiés.

  • Qu’est-ce que la dyspraxie ?

    Qu’est-ce que la dyspraxie ?

    La dyspraxie ou trouble de la coordination motrice d’origine développementale se définit par une réduction des performances dans les activités de tous les jours qui requièrent une coordination motrice, inférieures à celles attendues pour un enfant du même âge et de même intelligence

    • Ce déficit peut se manifester par
      • un retard dans les acquisitions motrices (marche)
      • une maladresse
      • de mauvaises performances sportives
      • une dysgraphie
    • Pour que l’on puisse parler de trouble, le déficit de coordination motrice doit avoir un impact sur la vie quotidienne ou les performances scolaires
    • Les enfants ne doivent pas présenter de pathologie organique associée (paralysie motrice, hémiplégie) pour que l’on puisse parler d’origine développementale

    Est-ce fréquent ?

    • La dyspraxie pourrait être aussi fréquente que la dyslexie.
    • Les études de prévalence qui mesurent dans la population générale le taux d’enfants présentant des troubles de la coordination motrice retrouvent des taux variant de 1,8 % à 18 % pour des enfants âgés de 5 à 12 ans selon les études.

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    La plupart des études de prévalence ont été réalisées sur des échantillons d’enfants représentatifs de la population générale à qui, on a fait passer une échelle de coordination motrice. Les enfants qui ont les moins bonnes performances sont considérés comme présentant un trouble de la coordination motrice. Le taux des enfants atteints dépend donc du seuil au dessous duquel on considère que la performance est basse.

    Seule une étude s’intéresse aussi aux répercussions sur la vie quotidienne et scolaire du déficit de coordination. Cette étude, réalisée en Grande Bretagne, sur un échantillon de 6 990 enfants de 7 et 8 ans, retrouve un taux de prévalence de 1,8%.

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    • Les garçons sont plus souvent touchés que les filles.

    La dyspraxie persiste-t-elle après l’adolescence ?

    • Les performances motrices des enfants dyspraxiques s’améliorent avec l’âge
    • mais les performances motrices des jeunes dyspraxiques restent inférieures à celles des jeunes du même âge qui ne présentent pas de trouble moteur.

    La dyspraxie ne disparaît donc pas à l’adolescence.

     

     

  • Les troubles de l’écriture manuscrite

    Au CP

    L’acquisition de l’écriture manuscrite est un enjeu majeur de cette première année d’école primaire et un défi constant pour les élèves dyspraxiques.

    Maladroits, ils peinent à reproduire les lettres dont ils doivent contrôler laborieusement le dessin. Ils ont des difficultés à tenir leur crayon correctement et à contrôler la pression qu’ils doivent exercer sur la feuille. Le tracé est lent et peu fluide. Le résultat est particulièrement insatisfaisant au regard des efforts déployés : les lettres sont trop grosses et tiennent rarement entre les deux lignes du cahier, leur tracé est malhabile, irrégulier et la qualité de ce tracé se dégrade au fur à mesure de l’exercice, les lettres en miroir sont fréquentes.

    Les exercices de copie

    Les performances en copie manuscrite sont particulièrement perturbées chez les élèves dyspraxiques.
    La copie nécessite une coordination oeil main qui est déficitaire chez ces enfants et la nécessité de réajuster les repères spatiaux pour passer d’un support (celui du modèle à copier) à l’autre (la feuille ou l’écran sur lequel on écrit) rend l’exercice particulièrement épuisant.

    La copie est la source de multiples malentendus puisque l’élève dyspraxique, à la différence des autres élèves, fait beaucoup plus de fautes en copie qu’en dictée. Contraint de mobiliser la totalité de ses ressources attentionnelles pour dessiner les lettres une à une, il s’épuise au fur à mesure que le texte s’allonge. Le texte devient illisible et les fautes d’orthographe se multiplient. Il n’est donc pas rare qu’après cet exercice épuisant, l’énorme effort qu’il a déployé soit sanctionné par « 20 fautes dans un texte de 8 lignes, tu pourrais faire un peu attention ! » écrit dans la marge (Keryan, élève dyspraxique de CE2).

    La copie est aussi toxique : en aboutissant à un texte inévitablement plein de fautes, elle met à mal le sens orthographique de ces élèves.

    Le redoutable piège de la double tâche

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    La double tâche cognitive

    Le cerveau ne peut pas faire deux choses en même temps si les deux tâches à réaliser requièrent de l’attention. C’est pour cette raison qu’il est déconseillé de téléphoner en voiture. Le cerveau ne peut pas traiter les deux tâches simultanément, en parallèle, et les traite donc l’une après l’autre, en série, ce qui est à l’origine d’une lenteur. Si la durée du traitement de la première tâche par le cerveau est trop longue, le sujet peut même ne pas réussir à réaliser du tout la seconde tâche.

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    Vers 8 ans, à l’âge où la plupart des enfants automatisent leur geste d’écriture, les enfants dyspraxiques, eux, continuent de dessiner chacune de leurs lettres ; ce traçage laborieux accapare la plus grande partie de leurs ressources attentionnelles, qui ne sont plus disponibles pour les tâches de haut niveau telles que l’orthographe, la syntaxe, l’expression écrite …

     

    Conséquences du trouble de l’écriture à l’école

    • Ce trouble de l’écriture manuscrite est particulièrement handicapant à l’école où 60 % du temps est consacré à des activités qui impliquent l’écriture.
    • Le plus handicapant pour l’enfant dyspraxique est qu’il est en situation de double tâche cognitive quand il écrit à la main.
    • Les conséquences de cette situation de double tâche sont multiples. L’enfant dyspraxique qui écrit
      • est lent
      • fait des erreurs
      • se fatigue
      • ne dispose plus de suffisamment de ressources cognitives pour réaliser les tâches de haut niveau (comprendre, raisonner, organiser ses idées, faire attention à l’orthographe etc….)
    • L’élève dyspraxique n’apprend donc rien en écrivant et l’évaluation scolaire via l’écriture manuscrite ne reflète pas ses acquisitions et ses connaissances mais le degré du handicap provoqué par la situation de double tâche cognitive

    Rééduquer l’écriture ?

    Face à un déficit de l’écriture, il semble logique de proposer sa rééducation : des séances d’ergothérapie ou de psychomotricité ciblées sur le geste écrit sont donc très souvent prescrites aux enfants dyspraxiques.
    Pourtant il n’existe aucun consensus sur des modalités précises de rééducation :

    • les études contrôlées portant sur l’efficacité de la rééducation du geste graphique font cruellement défaut dans la littérature internationale
    • lorsqu’elles existent, la plupart des études posent des problèmes méthodologiques (absence de groupe contrôle, effectif de l’échantillon réduit à quelques enfants, méthode peu structurée….)
    • il existe des travaux réalisés chez des enfants dysgraphiques indépendamment du diagnostic. Pour la plupart, ils mettent en évidence une amélioration de la lisibilité mais pas de la vitesse.

    Face à l’absence de données convaincantes démontrant l’efficacité d’une rééducation du geste écrit chez les enfants dyspraxiques, la question de la pertinence de ce type de prise en charge se pose.

  • L’enfant dyspraxique, mieux l’aider à la maison et à l’école
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  • Des difficultés dès l’école maternelle

    La motricité fine : Le calvaire de la grande section de maternelle

    La première difficulté à laquelle est confrontée l’élève dyspraxique à l’école maternelle est liée à la place majeure qui est donnée aux exercices de motricité fine.
    Dessin, perles, découpage, collage font partie des activités quotidiennes des enfants de maternelle.
    Dès leur entrée dans le monde scolaire, les enfants dyspraxiques sont donc confrontés à des activités qu’ils réalisent avec une grande difficulté en raison de leur handicap.

    La situation continue de se dégrader au moment de la dernière année de maternelle. Le nombre d’activités graphiques de préparation à l’écriture augmente et l’enfant malgré des efforts démesurés ne parvient que difficilement à écrire son nom.

    Les enseignants sont rapidement déconcertés par ces enfants qui s’expriment avec une grande aisance, sont souvent très intelligents mais s’avèrent incapables de dessiner un bonhomme.

    Des troubles du comportement ?

    Les enfants refusent les activités graphiques, se mettent sous la table au moment où l’atelier dessin démarre, jettent les ciseaux par terre. Il est essentiel de comprendre qu’il s’agit de troubles du comportement secondaires au trouble de la coordination motrice. Les enfants cherchent à éviter la répétition d’activités qui les mettent en grande difficulté. Il est inutile de chercher à résoudre les troubles du comportement en tant que tels. Seule la prise en compte des difficultés motrices de l’enfant pourra le soulager et faire disparaître ces troubles secondaires.

    La perte progressive de la confiance en soi

    Du haut de ses cinq ans, face aux adultes, parents et enseignants, qui se perdent dans des interrogations le plus souvent fort loin de sa réalité, l’enfant trouve lui-même l’explication aux difficultés qu’il rencontre : « Je ne vaux rien » dit Mathieu à son père, « j’ai une maladie dans la tête » déduit Manon, ou « Je m’applique, je m’applique et je fais toujours moins bien que les autres ».

  • Introduction à la dyslexie

    On considère qu’en France, environ 5 à 15 % des enfants ont des difficultés disproportionnées à apprendre la lecture. Sont-ils tous dyslexiques?

    Mauvais lecteur… mais pas forcément dyslexique

    De nombreux facteurs peuvent entraver l’apprentissage de la lecture : l’absence ou l’inadéquation de l’enseignement, un milieu social très défavorisé, un trouble du langage, un déficit intellectuel, un trouble d’attention, un trouble du comportement, une surdité ou un déficit visuel non corrigé…

    Qu’est-ce qu’une “vraie” dyslexie?

    Cependant, certains enfants présentent un trouble sévère de l’apprentissage de la lecture alors même qu’ils sont normalement intelligents, n’ont aucun déficit sensoriel, grandissent dans un milieu familial et social favorable et ont reçu un enseignement approprié : on parle alors de dyslexie développementale ou trouble spécifique de l’apprentissage de la lecture.

    La distinction entre dyslexie et difficultés de lecture est donc extrêmement importante même si, en pratique, il n’est pas toujours évident de les distinguer clairement d’un point de vue clinique. Dans la suite de cette section, on ne parlera que de la dyslexie proprement dite.

  • Définir et diagnostiquer la dyslexie

    Définition de la dyslexie

    Selon sa définition officielle, la dyslexie développementale se caractérise par une altération spécifique et significative de l’acquisition de la lecture, qui ne soit pas due à un retard mental, à des troubles de l’acuité visuelle ou auditive, ou à une scolarisation inadéquate.

    Les principaux symptômes

    • Typiquement, l’enfant dyslexique a des difficultés au niveau de l’identification des mots plutôt que de la compréhension du texte (ce qui le distingue souvent de la plupart des autres enfants en difficultés de lecture). Le principal obstacle est souvent le décodage des mots selon la procédure phonologique (faire correspondre un phonème à un graphème, c’est-à-dire un caractère sonore à un caractère écrit) : cela entrave l’acquisition du lexique orthographique et donc l’automatisation de la lecture. Cependant, il arrive parfois que d’excellentes capacités de discrimination et de mémoire visuelle permettent à l’enfant de compenser son déficit en mémorisant directement la forme visuelle de certains mots.
    • Du fait du retard que prend l’enfant dyslexique dans l’acquisition de la lecture, certaines manifestations d’une lecture immature, visibles chez de nombreux enfants en tout début d’apprentissage (confusions entre lettres, lecture en miroir…) peuvent perdurer plus longtemps que la normale chez l’enfant dyslexique. Ils sont généralement un simple symptôme du retard dans l’apprentissage et non pas le signe d’un déficit plus spécifique (notamment visuel).
    • D’autre part, l’enfant dyslexique a des difficultés à acquérir l’orthographe des mots. Il s’agit bien évidemment d’un autre aspect du même problème, à savoir les difficultés d’apprentissage des correspondances graphème-phonème et la pauvreté du lexique orthographique qui en découle ; c’est souvent le symptôme le plus durable. Des difficultés en orthographe persistent souvent à l’adolescence, même quand l’enfant a pu faire quelques progrès en lecture.

    A noter également que

    • Les enfants dyslexiques ont souvent des antécédents de troubles de la parole ou du langage.
    • La dyslexie s’accompagne souvent de troubles émotionnels et de perturbations du comportement pendant l’âge scolaire.

    Diagnostic

    Le diagnostic se base sur l’un ou l’autre des deux critères suivants (Expertise collective de l’INSERM 2007) :

    • La note obtenue à une épreuve standardisée d’exactitude ou de compréhension de la lecture se situe à au moins deux écarts-types en dessous du niveau escompté, compte tenu de l’âge et du quotient intellectuel de l’enfant (QI).
    • L’enfant a des antécédents de difficultés sévères en lecture ou a déjà répondu au critère précédent à un âge antérieur ; en outre le résultat obtenu à un test d’orthographe se situe à au moins deux écarts-types en dessous du niveau escompté, compte tenu de l’âge et du QI.

    Le diagnostic de la dyslexie fait donc appel, au strict minimum, à un test de lecture et à un test de QI, mais implique plus généralement à la fois un bilan orthophonique et un bilan neuropsychologique, qui permettent de bien cerner le profil de l’enfant. Le cas échéant, des examens complémentaires (ophtalmologiques, psychiatriques…) peuvent être requis. Ces bilans sont normalement prescrits et interprétés par un médecin formé à cet exercice, qui est donc responsable du diagnostic de dyslexie.

  • Dyslexie, troubles associés et évolution

    Troubles associés

    La dyslexie vient rarement seule. On parle alors de troubles associés.

    • L’enfant dyslexique a souvent des troubles de langage oral, qui peuvent être relativement bénins (léger retard d’apparition du langage, faible mémoire verbale à court terme) ou justifier un véritable diagnostic de trouble spécifique du langage oral. Environ la moitié des enfants dyslexiques ont un niveau de langage oral au moins un écart-type sous la norme pour leur âge. Au-delà de l’association réelle des troubles, il faut aussi noter qu’après quelques années d’école primaire, le niveau de langage des enfants dyslexiques peut avoir tendance à baisser relativement aux enfants de même âge, du fait de l’influence croissante de la lecture sur l’acquisition du vocabulaire et des subtilités du langage.
    • Les enfants dyslexiques présentent souvent des troubles déficitaires de l’attention avec hyperactivité, à une fréquence estimée aux alentours de 30 %.
    • On observe également des troubles moteurs (dyspraxie [lien interne], dysgraphie [lien interne]) chez environ 50% des enfants dyslexiques.
    • Il y a de forts soupçons d’une association entre dyslexie et dyscalculie, qui pourrait cependant être en partie confondue avec les problèmes de calcul mental liés au déficit de mémoire verbale à court terme des dyslexiques.
    • Il semble également que l’on observe chez l’enfant dyslexique des troubles anxieux ou dépressifs plus fréquemment que dans la population générale. L’explication la plus probable est qu’ils sont tout simplement secondaires à la situation d’échec dans laquelle l’enfant est plongé du fait de sa dyslexie.
    • Divers autres troubles associés sont fréquemment rapportés, incluant des problèmes d’orientation dans l’espace (notamment des confusions droite-gauche), de repérage dans le temps, d’arithmétique… Il se pourrait bien qu’il y ait plusieurs sortes de dyslexie: bien qu’un déficit phonologique soit le plus fréquent,  certaines dyslexies sont liées à des troubles de l’attention visuo-spatiale.
    • Enfin, il est souvent évoqué l’idée d’une association entre la dyslexie et certains talents particuliers (artistiques, mathématiques, ou autres) ou la précocité intellectuelle. De toute évidence, la dyslexie n’est en rien incompatible avec des talents exceptionnels: cela a été observé dans de nombreux cas. Néanmoins aucune donnée solide ne permet d’affirmer que ce soit le cas plus fréquemment dans la dyslexie que dans le reste de la population.

    Évolution de la dyslexie

    Des signes avant-coureurs de la dyslexie sont souvent présents avant l’entrée au CP :

    • Les études rétrospectives et longitudinales mettent notamment en évidence que les enfants dyslexiques ont eu, plus fréquemment que les autres, des retards ou des difficultés de langage oral – qu’ils aient été suffisamment sévères pour justifier un diagnostic formel ou pas.
    • Plusieurs symptômes du déficit phonologique sont également des précurseurs de la dyslexie.

    Comme dans tous les troubles développementaux, les symptômes évoluent avec le temps, en fonction de la maturation de l’enfant, de l’enseignement et de l’aide thérapeutique qu’il reçoit. On considère en général qu’on ne guérit jamais véritablement d’une dyslexie. Néanmoins, tous les dyslexiques peuvent apprendre à lire, c’est-à-dire à décoder un texte, même avec une certaine lenteur. Certains adolescents dyslexiques finissent par atteindre un niveau de lecture normal (pas plus d’un écart-type sous la norme), le plus souvent en mobilisant fortement leurs ressources intellectuelles préservées pour contourner le trouble et au prix d’efforts personnels considérables. Malgré tout, des symptômes du trouble sous-jacent perdurent, notamment la lenteur de la lecture et de grandes difficultés avec l’orthographe des mots, qui peuvent rester le seul symptôme remarquable chez le dyslexique adulte.

  • Les causes de la dyslexie

    D’où viennent les troubles spécifiques de l’apprentissage de la lecture. Dans la mesure où l’on peut écarter des causes telles qu’un déficit intellectuel, un déficit sensoriel (penser à la surdité mal dépistée!), un désavantage social, ou une carence pédagogique, l’hypothèse par défaut pour expliquer la dyslexie est l’existence d’un déficit cognitif relativement spécifique.

    La conscience phonologique

    Selon l’hypothèse dominante aujourd’hui (la théorie dite phonologique), le principal problème des enfants dyslexiques se situe dans un déficit de leur conscience phonologique.

    La conscience phonologique est la capacité à réaliser que le langage parlé se décompose en sous-unités, les phonèmes, qui se combinent entre eux pour former des mots. Elle émerge vers 5 ou 6 ans et est une condition nécessaire à l’apprentissage de la lecture. Elle est par exemple utilisée dans la résolution des tâches suivantes :

    • à l’oral, détection d’intrus sur des rimes ou des allitérations (ex : route, goutte et barre) ;
    • contrepèteries (pour des enfants plus âgés) : par exemple, échanger les sons initiaux de deux mots (citron/bateau → bitron/sateau) ;
    • dénomination rapide d’images.

    La performance des enfants dyslexiques est plus faible dans ces tâches non seulement par rapport aux autres enfants de leur âge, mais aussi par rapport aux enfants de leur niveau de lecture (donc plus jeunes qu’eux) : on suppose donc que le déficit de la conscience phonologique préexiste à l’apprentissage de la lecture chez les enfants qui vont devenir dyslexiques. Certains chercheurs l’ont montré en suivant les enfants depuis la maternelle, voire depuis la naissance (Lyytinen 2004, Scarborough 1990).

    Le cerveau dyslexique

    L’IRM fonctionnelle* permet de visualiser la chaîne d’activité cérébrale au cours de la lecture : on peut donc découvrir le “pendant neural” de ce qui est observé au plan comportemental. Ainsi, trois principales zones de l’hémisphère gauche du cerveau humain sont impliquées dans la lecture et son acquisition (Démonet 2004) : la jonction occipito-temporale (en rouge), la jonction pariéto-temporale (en vert) et le gyrus frontal inférieur (en bleu).

    Chez les dyslexiques, l’activité cérébrale est insuffisante dans plusieurs régions. L’une d’entre elles est la “boite aux lettres” du cerveau, située dans le cortex occipito-temporal de l’hémisphère gauche: à âge égal, celle-ci ne se développe pas normalement — c’est sans doute une conséquence du fait que les enfants n’apprennent pas à lire.

    D’autres aires, situées à la jonction pariéto-temporale et dans le gyrus frontal inférieur, sont également sous -activées, particulièrement lorsque l’enfant ou l’adulte effectue des jugement de rime. Leur activation insuffisante pourrait refléter une anomalie primaire du traitement des sons du langage parlé.

     

    L’étude de la structure même du cerveau peut permettre d’expliquer une partie de ces différences de fonctionnement :

    • Grâce à l’IRM anatomique, on observe dans le cerveau dyslexique une réduction du volume du cortex dans deux des régions liées à la lecture : l’aire frontale inférieure  et l’aire pariéto-temporale (verte), mais pas dans la zone occipito-temporale (rouge) (Eckert 2004). Cette dernière région étant impliquée dans le traitement orthographique, on peut supposer que sa faible activation n’a pas de cause structurelle et reflète simplement le manque d’entraînement des représentations orthographiques de l’enfant dyslexique, alors que les deux autres régions sont plus spécifiquement liées au déficit phonologique.
    • L’imagerie anatomique a également permis d’observer les connexions reliant les aires du cerveau. Chez les dyslexiques, cette technique montre une connectivité plus faible sous les aires pariéto-temporales (en vert) : ces dernières sont probablement moins bien connectées entre elles et aux autres régions du cerveau, notamment le cortex préfrontal.
    • Enfin, certains chercheurs ont pu disséquer des cerveaux de dyslexiques post-mortem. Ils ont observé des anomalies subtiles du cortex liées à des problèmes de migration neuronale pendant le développement fœtal. En effet, après 16-24 semaines de grossesse, les neurones doivent migrer vers le cortex, mais il peut arriver qu’un groupe de neurones manque sa cible dans une des couches du cortex et s’accumule au-delà (on parle alors d’ectopies). Chez les dyslexiques, ces ectopies sont situées majoritairement dans les aires du langage (dans l’hémisphère gauche), en particulier dans les aires frontales (bleues) et pariéto-temporales (vertes) impliquées dans la phonologie et la lecture. Elles pourraient être à l’origine des anomalies de matière grise et de connectivité et donc la cause directe de la dyslexie.

    Des causes souvent génétiques

    Quelle est l’influence des facteurs génétiques ?

    Si un enfant est dyslexique, il existe de fortes chances pour que plusieurs membres de sa famille le soient également. Bien sûr, cette agrégation familiale de la dyslexie ne prouve pas son origine génétique : l’environnement partagé par une famille peut notamment être en cause (on imagine que des parents qui ne lisent pas créent pour leur enfants un environnement moins favorable à l’apprentissage de la lecture). Cependant, des études de jumeaux ont permis d’établir que l’héritabilité* de la dyslexie est de l’ordre de 50-60 % : la dyslexie a donc bien une origine partiellement génétique.

    Quels gènes sont impliqués ? Grâce à la génétique moléculaire, nous savons qu’une multiplicité de sites chromosomiques sont impliqués dans la dyslexie. Nous sommes donc dans une logique de maladie génétique complexe, où les différents facteurs génétiques interagissent entre eux et avec des facteurs environnementaux, et modulent ainsi la probabilité de développer le trouble. Six gènes ont été associés à la dyslexie, dont quatre sont impliqués dans la migration neuronale : ils pourraient donc contribuer à expliquer les anomalies du cortex (ectopies) observées dans le cerveau des dyslexiques.

    Maladie génétique, donc irréversible ?

    L’existence de facteurs génétiques sous-jacents à la dyslexie ne doit pas empêcher de chercher des méthodes de remédiation. Le cerveau de l’enfant est particulièrement plastique, et peut très bien trouver des circuits de compensation pour apprendre à lire.

    Dans la mesure où l’on ne peut pas intervenir sur les facteurs génétiques, c’est d’autant plus sur les facteurs non-génétiques, notamment la prévention précoce et la rééducation, que l’on peut compter pour améliorer le développement de l’enfant.

    Même si un enfant éprouve de grandes difficultés à apprendre à lire, c’est avant tout à l’école et à l’enseignant de faire preuve d’encore plus de pédagogie et de patience que d’habitude, afin de parvenir à inculquer le décodage des mots écrits.

  • Les traitements de la dyslexie

    Quelle rééducation pour la dyslexie?

    Le marché de la rééducation de la dyslexie est immense et occupé par une grande diversité de méthodes de rééducation et d’entraînement. Malheureusement, peu d’entre elles ont été validées scientifiquement, à l’issue d’essais cliniques correctement contrôlés. Pour la majorité des traitements proposés, l’absence de données empiriques probantes doit donc conduire à la plus grande prudence.

    La rééducation orthophonique

    L’orthophonie est traditionnellement la rééducation par défaut préconisée pour la dyslexie. Les caractéristiques principales de la rééducation orthophonique de la dyslexie sont :

    • l’entraînement des capacités phonologiques de l’enfant ;
    • la rééducation de la lecture avec des méthodes souvent différentes de celles possibles en classe ;
    • la mise en place de stratégies de compensation pour permettre à l’enfant de contourner les déficits identifiés ;
    • un programme de rééducation individualisé, fondé sur un bilan précis des compétences et des faiblesses de l’enfant, permettant une interactivité optimale et une adaptation en temps réel aux besoins de l’enfant.

    La rééducation orthophonique repose sur des principes généraux issus des connaissances scientifiques acquises et validées au cours des dernières années. De ce fait, les types les plus courants de rééducation orthophonique pratiquées en France sont présumés efficaces. Néanmoins, les pratiques ayant cours sont variées et peu codifiées et n’ont pas encore fait l’objet de véritable évaluation scientifique dans le traitement de la dyslexie. Il s’agit là d’une lacune importante qui demande à être comblée.

  • Lecture: Mes yeux n’écoutent pas mon cerveau

    Fatigue à la lecture

    • La lecture requiert un calibrage des saccades oculaires très élaboré pour pouvoir localiser les mots et progresser le long de la ligne. Les enregistrements des mouvements des yeux des enfants dyspraxiques montrent qu’ils ne peuvent pas fixer longtemps un stimulus et que leur regard à tendance à errer sur l’écran. Bien que parfaitement capables de décoder, les enfants dyspraxiques accèdent difficilement à une lecture fluide et doivent continuer à déchiffrer quand les autres enfants ont automatisé la lecture de la majeure partie des mots courants.
    • L’absence d’automatisation des stratégies de regard rend la prise d’informations visuelles extrêmement coûteuse et fatigante. Cela limite considérablement la longueur des textes que les enfants peuvent lire.
    • Les troubles d’organisation du regard gênent la prise d’informations lorsqu’elles sont présentées visuellement. Les enfants se perdent dans les textes, leurs yeux errent sur la page sans qu’ils puissent repérer les informations pertinentes. L’exploration visuelle de l’environnement ou de figures et dessins est compromise.

    L’adaptation des textes à lire: une solution

    Pour faciliter l’accès au texte des enfants dyspraxiques, une bonne solution consiste à adapter les textes à lire.

    On peut ainsi proposer des textes écrits dans une police plus grosse, avec des mots plus espacés, et des espaces entre les lignes augmentés. Pour éviter la confusion entre deux lignes qui se suivent, on peut colorier ou surligner les lignes dans des couleurs différentes.

     

  • Difficultés en mathématiques

    Activités de dénombrement

    Les enfants dyspraxiques ont des difficultés à dénombrer les objets d’une collection.

    • La coordination entre le doigt et l’œil, essentielle pour pointer des objets, est défaillante. L’enfant compte et recompte indéfiniment la même collection d’objets, en oublie un, compte le même plusieurs fois, et ne parvient jamais au même nombre. Peu à peu s’installe l’idée que l’invariance du nombre n’existe pas puisqu’une quantité d’objets pourtant invariante n’aboutit jamais au même nombre. Dès la maternelle, en l’absence de remédiation, le sens du nombre est mis à mal par les activités de dénombrement.
    • Les difficultés de dénombrement liées à la défaillance du pointage manuel et occulaire des objets persistent en primaire en l’absence de rééducation et conduisent à des performances médiocres dans toutes les activités de comptage de collections. La répétition de ces exercices est nuisible, détruisant peu à peu le sens du nombre, préalable essentiel au calcul.

    Lecture de nombres à plusieurs chiffres

    • La numération arabe repose sur les relations spatiales entre les chiffres (dizaine à gauche, unité à droite). Les perturbations du traitement de l’information spatiale des enfants dyspraxiques peuvent les empêcher de faire la différence entre 21 et 12.
    • Un moyen de remédiation consiste à remplacer la norme spatiale par une norme par couleur, par exemple dizaine en rouge et unité en bleu, pour que les enfants puissent lire les nombres.


    Opérations posées

    OperationLa pose des opérations est un écueil fréquent. En raison de leurs difficultés visuo-spatiales, les enfants échouent à aligner les chiffres en colonne alors même qu’ils ont très bien compris les principes qui sous-tendent la résolution des opérations. Ces erreurs d’alignement des chiffres les conduisent à des résultats faux qui sont liés non pas à des erreurs de calcul mais à l’impossibilité de résoudre l’algorithme spatial dont dépend l’opération à poser.

    Géométrie

    Geometrie

    La géométrie les confronte à deux difficultés importantes :

    • Difficultés liées au handicap moteur : l’enseignement des concepts géométriques passe, en grande partie, par du traçage de figures. Les enfants échouent à manipuler les règles, compas, rapporteur et équerre qui sont indispensables au dessin des formes géométriques.
    • Difficultés liées aux perturbations du traitement de l’information visuo-spatiale : certains enfants ne voient pas les angles, peinent à distinguer les diagonales ou ne parviennent pas à repérer un carré dans un rond qui leur apparaît sous forme de traits séparés.

    Il est donc essentiel de permettre aux enfants dyspraxiques d’acquérir les notions de géométrie en les dissociant de la réalisation pratique des figures.

  • Dyspraxie, adapter l’environnement, pas l’enfant !

    Une nouvelle approche de la prise en charge des élèves dyspraxiques

    • Lors d’une conférence en 2006, Cheryl Missiuna intitula son intervention sur la prise en charge du trouble de la coordination motrice : « New models for changing the environment, not the child » (*). Cette nouvelle approche est basée sur le constat qu’une fois l’enfant entré dans le système scolaire, le problème majeur n’est plus seulement le trouble de la coordination motrice en lui-même, mais surtout ses conséquences sur la performance scolaire, la participation sociale, la santé émotionnelle et l’estime de soi des enfants. Il ne s’agirait plus alors de rééduquer le déficit mais plutôt de le contourner et de le compenser pour en réduire les conséquences.
    • C’est particulièrement vrai dans le domaine scolaire. Il s’agit de donner la possibilité à l’enfant d’acquérir les mêmes compétences scolaires que ses pairs, à l’exception de celles qui sont directement touchées par son handicap, sans être gêné par ses troubles. Si les difficultés rencontrées par les enfants dyspraxiques à l’école sont réelles, il n’en reste pas moins que leurs capacités intellectuelles leur permettent de faire les mêmes acquisitions scolaires que les enfants de leur classe d’âge. Leur donner la possibilité d’atteindre le niveau scolaire qui correspond à ces capacités est essentiel. Tous les efforts doivent être déployés pour que les aménagements indispensables de la scolarité soient mis en place.

    Rendre accessible l’école et les contenus scolaires

    La première question à se poser est celle de l’accessibilité.

    • Dans le cas d’un enfant en fauteuil roulant, rendre accessible l’école signifie mettre en place des rampes et des ascenseurs pour que l’élève puisse rejoindre sa salle de classe. L’enfant dyspraxique qui se perd dans les couloirs du collège ou du lycée en raison de ses perturbations de repérage spatial doit aussi bénéficier de mesures spécifiques pour se rendre dans la salle de cours. On peut ainsi proposer que ce soient les enseignants qui changent de classe plutôt que les élèves ou mettre en place un système de signalisation lui permettant de repérer plus facilement les salles de cours dans lesquelles il doit aller et la direction de la sortie du collège (par exemple, autocollants sur les portes, et dans les couloirs).
    • Dans le cas d’un enfant aveugle, rendre accessible un contenu scolaire (fiche, manuel) implique de lui donner la possibilité de le lire en braille, par exemple. De la même façon, les enfants dyspraxiques qui ont des troubles d’organisation du regard doivent bénéficier de contenus scolaires accessibles qui leur permettent de faire le même travail que les autres élèves de façon autonome et dans le même temps. Pour cela, les supports proposés devront être adaptés en amont, par exemple, en évitant les présentations en colonnes, en limitant le nombre d’informations par page, en évitant les dessins sans rapport avec l’exercice demandé, en augmentant l’interligne, parfois en augmentant la taille des caractères etc….

    Compenser les déficits

    Une fois les contenus scolaires rendus accessibles, il faut se poser la question de la compensation du déficit du trouble du geste et en particulier de l’écriture manuscrite.

    • L’enfant dyspraxique apprendra donc l’orthographe en épelant les mots ou en utilisant des lettres magnétiques, donnera des réponses orales aux questions ouvertes, utilisera un traitement de texte ou des contenus numériques scolaires adaptés , dictera à un secrétaire.
    • Les tâches motrices non pertinentes telles que le découpage et le collage d’étiquettes qui épuisent inutilement l’enfant sont aussi à éviter.
    • Pour la géométrie, l’enfant bénéficiera de l’utilisation d’un logiciel spécifique pour tracer les figures.
  • Les cartables fantastiques : des projets pilotes

    L’absence d’outils facilitant l’inclusion scolaire des enfants dyspraxiques est patente. Les enseignants  qui voient arriver dans leur classe des enfants dont personne ne leur a réellement expliqué les difficultés spécifiques sont souvent bien démunis. Les sites du Cartable Fantastique sont nés de ce constat.

    Le Cartable Fantastique de Manon

    Ce site présente les supports scolaires adaptés et utilisés par une petite fille atteinte d’un trouble de la coordination motrice de la classe de CE1 à celle de CM2.

    • Les adaptations sont réalisées à partir des supports pédagogiques des enseignantes.
    • Elles sont le plus souvent numériques : l’enfant ouvre son ordinateur au moment où les autres ouvrent leur manuel ou prennent leur fiche.
    • En termes de contenu, l’élève dyspraxique fait donc la même chose que le groupe classe mais au lieu d’écrire, elle donne des réponses en cliquant et en tapant au clavier.

    Le Cartable Fantastique

    Sur le site internet de l’association Le Cartable Fantastique sont proposés:

    • des ressources scolaires déjà adaptées:
      • des exercices de grammaire disponibles en ligne sur le site du CRDP de Champagne-Ardennes (du CE1 au CM2) ont été transformés en exercices numériques
      • des contes et des fables issus du patrimoine sous forme de livres numériques avec une présentation qui facilite la lecture.
    • des outils pour adapter les ressources scolaires: la plateforme Les Cahiers Fantastiques, développé par Toussaint Guglielmi et Caroline Huron, au sein du laboratoire Unicog permet de créer des exercices numériques adaptés aux enfants dyspraxiques
    • des outils pour aider les enfants à travailler en classe:
      • des modèles pour les rubans word permettent l’insertion de gabarits facilitant la pose des opérations, la réalisation de frises historiques etc… à l’aide d’un traitement de texte.
      • des règles de lecture à imprimer
      • des tableaux de numération à plastifier
      • des descriptions et tutoriels de logiciels utiles pour les élèves dyspraxiques.

    Les premiers essais montrent que l’utilisation des ressources adaptées facilite considérablement le quotidien scolaire des enfants dyspraxiques. Elle accroît leur autonomie et, en leur permettant de suivre en classe, améliore considérablement leur confiance en leurs capacités.

    Ces projets pilotes ont le mérite d’exister mais ils ne doivent pas faire oublier que l’inclusion scolaire reste encore trop souvent un combat épuisant pour les enfants dyspraxiques et leurs familles.

  • Caractéristiques

    La dyscalculie est une difficulté d’apprentissage du calcul. Ce trouble se caractérise notamment par :

    • la présence de difficultés dans le calcul alors que l’intelligence est normale ;
    • l’association éventuelle de ces difficultés à d’autres troubles de l’apprentissage (comme la dyslexie, la dyspraxie…) ;
    • l’hypothèse que ces difficultés sont causées, non pas par un enseignement inefficace, mais par un dysfonctionnement cérébral (Wilson 2005).

    Prévalence

    Dans cette section, nous parlons principalement de dyscalculie développementale : l’acalculie, quant à elle, qui peut avoir des effets similaires, est généralement acquise à la suite d’un accident cérébral (qui survient le plus souvent dans le lobe pariétal) (Stanescu-Cosson 2000). La prévalence estimée de la dyscalculie développementale est d’environ 3 à 7% selon des données américaines, c’est-à-dire une prévalence similaire à celle de la dyslexie (Badian 1999, Butterworth 2011). En France, la prévalence de la dyscalculie dans la population des enfants en âge d’être scolarisés se situe entre 3,6% et 7,7% selon les données de l’INSERM (2007).

    Diagnostic

    En ce qui concerne le diagnostic de la dyscalculie, il s’est appuyé jusqu’à aujourd’hui sur les effets, c’est-à-dire les difficultés rencontrées en calcul. Les enfants souffrant d’une dyscalculie développementale présentent généralement un retard persistant dans leur apprentissage du calcul ; les manifestations du trouble dépendent de l’âge et de la classe de l’enfant.

    • Les jeunes enfants dyscalculiques (au CP) ont un retard dans leur maîtrise du comptage : pendant plusieurs années, ils continuent d’utiliser la procédure laborieuse du comptage sur les doigts pour résoudre de simples additions ou soustractions, alors que les autres enfants sont déjà passés au comptage verbal et à la mémorisation des opérations ;
    • Les enfants dyscalculiques un peu plus âgés (vers 9-10 ans) présentent de sévères difficultés d’apprentissage des tables arithmétiques et de compréhension des opérations.

    Cependant, comme nous l’avons mentionné plus haut, la dyscalculie développementale doit être relativement spécifique aux mathématiques : en effet, de nombreuses raisons peuvent causer des difficultés similaires (retard mental, trouble de l’attention, troubles d’anxiété, etc). C’est pourquoi la première nécessité avant le diagnostic est d’écarter tout autre facteur possible qui pourrait être responsable du trouble (Shalev 2001). Cette approche, qui semble raisonnable, n’est pas évidente en pratique et de nombreux obstacles subsistent dans la définition de la dyscalculie.

    Associations génétiques et environnementales

    D’après des études récentes :

    • d’une part, la dyscalculie peut être liée à de nombreuses maladies génétiques, comme le syndrome de Turner, le syndrome de William (Ansari 2002) et le syndrome de l’X fragile ;
    • d’autre part, elle dépend également de facteurs environnementaux : elle est ainsi observée particulièrement souvent chez les enfants ayant souffert d’un syndrome d’alcoolisation fœtale (exposition à l’alcool durant la grossesse) et peut survenir en conséquence d’une naissance prématurée et/ou d’un faible poids à la naissance (Fayol 1998).

    Il est à espérer que les progrès de la génétique et de la recherche scientifique en neuropsychologie (cf. Les bases cérébrales de la dyscalculie [lien interne]) permettront ainsi, dans un futur proche, d’établir le diagnostic de dyscalculie directement à partir de ses causes cérébrales.

  • La recherche en génétique, en neurobiologie et en épidémiologie a montré que la dyscalculie, de la même manière que les autres troubles de l’apprentissage, est un trouble lié au cerveau et en particulier à un dysfonctionnement des régions/connexions cérébrales impliquées dans le calcul.

    La recherche clinique sur l’acalculie (généralement acquise à la suite d’un accident vasculaire cérébral) est le premier acteur de la compréhension du mécanisme cérébral de la dyscalculie, du fait de la similarité qui existe entre les deux troubles. Les patients acalculiques ne présentent pas de troubles du langage, de la lecture ou de la mémoire. La plupart d’entre eux, qui n’avaient aucun trouble du calcul avant l’accident, ont sévèrement perdu leur sens du nombre et leurs compétences arithmétiques au moment de l’accident. Le plus fréquemment, ces troubles sont associés à des lésions dans la région pariétale gauche, connue pour accueillir le système numérique principal.

    La neuroimagerie fonctionnelle a été très récemment appliquée à la dyscalculie :

    • Des chercheurs ont notamment rapporté le cas d’un jeune adulte souffrant d’une dyscalculie développementale associée à une intelligence et une capacité de lecture particulièrement élevées (Levy 1999).
      Malgré l’absence d’anomalies structurelles macroscopiques, un défaut dans la région pariétale inférieure gauche a été révélé par spectroscopie par résonance magnétique (une technique analytique non-invasive associée à l’imagerie par résonance magnétique et utilisée dans l’étude de l’évolution métabolique de troubles cérébraux, de tumeurs, etc).
    • De la même manière, d’autres chercheurs ont isolé une région du sillon intrapariétal gauche ayant un volume réduit de matière grise chez les enfants dyscalculiques prématurés, par rapport à des enfants prématurés non-dyscalculiques.
    • Le dysfonctionnement du système numérique principal n’est pas pour autant forcément la seule cause de la dyscalculie.
      Comme mentionné dans la section Apprendre les opérations [lien interne], le circuit de la mémorisation verbale et le “par coeur” est également crucial dans le traitement arithmétique ;
      il semble également déficient chez les enfants dyscalculiques.
    • Enfin, les personnes atteintes d’une dyscalculie développementale recrutent d’autres régions cérébrales pour compenser leur déficit en mathématiques.
      Alors que, chez les “calculeurs normaux”, les tâches arithmétiques activent principalement les deux sillons intrapariétaux (gauche et droit) et très peu le gyrus frontal gauche, les régions les plus actives chez les personnes dyscalculiques sont le sillon intrapariétal droit et le gyrus frontal médian gauche (Morocz 2003).
      Malheureusement, cette plasticité cérébrale spontanée ne semble pas suffire à compenser entièrement le handicap, du moins pas en l’absence d’un programme spécifique de remédiation.
  • La dyscalculie n’est pas une fatalité

    Que la dyscalculie soit causée par un dysfonctionnement cérébral ne rend pas inutiles les tentatives de remédiation : les effets du troubles peuvent en fait être efficacement réduits par une prise en charge adéquate.
    En effet, le fonctionnement et la structure du cerveau ne sont pas entièrement déterminés par des facteurs génétiques, mais aussi par l’influence de l’environnement.
    Les études des dernières années ont montré l’impressionnante plasticité cérébrale.

    Une aide supplémentaire

    Les enfants dyscalculiques ont besoin d’une aide supplémentaire dans leur apprentissage des nombres et du calcul. De récentes études ayant suggéré que leurs difficultés en mathématiques pourraient résulter d’un problème de compréhension de la signification des nombres (cf. Les bases cérébrales de la dyscalculie [lien interne]) ou de mémoire verbale, la meilleure méthode de remédiation est probablement d’identifier les régions qui portent les difficultés de l’enfant et d’intervenir en particulier sur elles.

    • Dans le cadre de difficultés du système numérique principal, il peut ainsi être utile de renforcer  la compréhension des quantités, ainsi que le lien entre les symboles et les quantités qu’ils représentent ;
    • Pour des difficultés liées plus spécifiquement à la mémoire verbale, une intervention ?? sera plus adaptée.

    Des stratégies dans un avenir proche

    Des stratégies de réhabilitation formellement testées par la recherche pour leur pertinence et leur efficacité dans les différents types de dyscalculie devraient apparaître dans les prochaines années.