Mon Cerveau à l'école

Quelques éléments de sciences cognitives pour les enseignants et les parents

Newsletter été 2022

Chères familles, chers collaborateurs,

Voici notre newsletter de l’été ! Nous vous souhaitons un merveilleux été rempli d’aventures et de découvertes estivales !

Vous pourrez lire nos dernières découvertes scientifiques sur le cerveau des bébés et des enfants ainsi que nos études en cours ou à venir ! Nous tenons avant tout à remercier chaleureusement tous nos petits chercheurs en herbe et leurs parents que nous avons vu ces derniers mois à Neurospin ainsi qu’à la maternité d’Orsay !

ATTENTION, NOTRE ADRESSE MAIL A CHANGE
Vous pouvez désormais nous joindre à :  neurokidslab@cea.fr

Voici quelques résultats de nos études récentes

Chez les bébés

Les capacités de segmentation de la parole chez les nouveau-nés

Notre série d’expériences réalisées dans les maternités de Port-Royal et d’Orsay sont désormais publiées (merci encore aux familles qui ont accepté de participer !)

Nous nous sommes intéressés aux mécanismes qui permettent aux nouveau-nés d’apprendre leur langue maternelle si rapidement, notamment en apprenant les statistiques en les syllabes d’une langue.

Pour apprendre une langue, la première étape est sans doute d’en isoler les mots. C’est sur cette question que porte notre série d’expériences. Or, contrairement à l’écrit où les mots sont clairement et systématiquement séparés par un espace, à l’oral il n’existe pas d’éléments aussi systématiques pour séparer les mots les uns des autres. Pour découvrir les mots, les nouveau-nés doivent donc découper un flot continu de parole. On appelle ce processus la segmentation.

En 1996, J.Saffran et ses collègues ont proposé un mécanisme qui pourrait être à l’œuvre pour permettre cette segmentation : les probabilités de transition entre syllabes. Dernière ce terme ce cache une idée simple : certaines syllabes sont souvent prononcées l’une après l’autre (‘ma’ et ‘man’ par exemple) et d’autres très rarement (‘man’ et ‘va’). En remarquant cela, les bébés pourraient donc faire l’hypothèse que ‘maman’ est un mot contrairement à ‘manva’ et trouver ainsi les limites entre les mots.

Pour tester cela chez le nouveau-né de quelques jours à peine, nous avons mesuré l’activité de leurs cerveaux grâce à l’EEG pendant que nous faisions écouter des suites de syllabes dans un ordre précis. Nous avons ensuite pu mesurer que les syllabes prononcées souvent l’une après l’autre impliquaient une réponse cérébrale différente des syllabes rarement associées. Les nouveau-nés endormis sont donc capable de découvrir les mots grâce aux statistiques d’une langue dès les premiers jours de vie !

De plus, lorsque les bébés écoutent des suites de syllabes, leur cerveau répond à chacune de ces syllabes et nous pouvons observer leur cerveau oscillant au rythme des syllabes. Nous avons observé que lorsque les nourrissons écoutent un langage artificiel formé de mots de trois syllabes, leur cerveau répond également aux mots et nous avons pu observer leurs réponses neuronales oscillant au rythme des mots. Cela montre aussi qu’ils ont découvert les mots de la langue.

oscillations au rythme des syllabes et des mots quand ils écoutent des suites de mots

Nous avons ensuite prolongé nos recherches en nous intéressant à la généralisation de cet apprentissage pour des mots plus longs (de 4 syllabes) ce qui pose des difficultés aussi bien aux bébés qu’aux adultes. Nous avons montré que dans ce cas, les statistiques ne sont pas suffisantes et que la prosodie (la façon dont on parle) jouait alors un rôle important. En effet, un silence, même subliminal (de quelques millisecondes), à la fin des mots aide grandement l’apprentissage. C’est vrai chez les nouveaux nés endormis mais aussi chez les adultes, montrant encore une fois que ces mécanismes d’apprentissages sont déjà présents et fonctionnels dès la naissance !

Activations cérébrales sans pause et avec pause entre les mots

Si vous souhaiter en savoir plus, les études complètes sont maintenant publiés sous les référence :

Fló, A., Benjamin, L., Palu, M., & Dehaene-Lambertz, G. (2022). Sleeping neonates track transitional probabilities in speech but only retain the first syllable of words. Scientific Reports12(1), 1-13.

Benjamin, L., Flo, A., Al Roumi, F., & Dehaene-Lambertz, G. (2022). Humans parsimoniously represent auditory sequences by pruning and completing the underlying network

Chez les enfants

Le projet Bien Joué

Plusieurs recherches de laboratoire ont montré que la compréhension de l’arithmétique chez les élèves pouvait être facilitée par certains jeux à contenu numérique. Dès lors, suffirait-il d’inciter les élèves à jouer pendant l’été pour améliorer leurs performances à la rentrée ? En collaboration avec la Fédération Française de Bridge, plusieurs milliers d’enfants de fin de CP ont reçu, juste avant les vacances, un jeu de cartes « le petit bridge » et un jeu de plateau « Lianes et Cascades ». Une centaine de classes volontaires, situées en REP/REP+ dans 4 départements très défavorisés (Guadeloupe, Nord, Pas de Calais, et la Réunion) ont été répartis aléatoirement en classes expérimentales (avec jeux) et contrôles (sans jeux). Les élèves des écoles expérimentales ont reçu les jeux dans la dernière semaine de CP (fin juin 2021) et ont pu jouer brièvement en classe avant de repartir chez eux avec les jeux. Au retour des vacances, à l’entrée au CE1, nous avons comparé leurs progrès à l’aide des évaluations nationales (programme EvalAide) et d’un questionnaire.

Les résultats montrent que :

  • Les élèves qui avaient reçu les jeux ont gagné en confiance dans leurs capacités, en mathématiques et en lecture.
  • Cependant, en moyennes, les élèves qui avaient reçu les jeux ne présentent pas des performances supérieures aux élèves contrôles, ni en maths, ni en langage.
  • Trop peu d’élèves (entre 10 et 20% selon les estimations) ont joué à ces jeux pendant l’été. Ces élèves ont davantage progressé que les autres, en mathématique comme en langage — mais comme il s’agissait de meilleurs élèves dès le départ, rien ne permet d’affirmer que c’est le fait d’avoir utilisé nos jeux qui les a fait progresser.

Plusieurs éléments peuvent expliquer ce faible impact: l’épidémie de Covid, le peu de temps disponible pour enseigner les jeux avant les vacances, et surtout le fait que près de 40% des élèves de REP/REP+ ne jouent régulièrement à aucun jeu, et n’ont pas adopté ceux que nous leur proposions. Il semble donc probable que ces résultats puissent être améliorés en introduisant les jeux à l’école tout au long de l’année, avec une véritable pédagogie qui enseigne non seulement les règles des jeux, mais surtout les concepts mathématiques et les raisonnements sur lesquels ils reposent. Une telle opération, appelée « Les oiseaux compteurs », est actuellement en cours.

Cette recherche souligne l’importance de l’expérimentation, même si son résultat est négatif : en son absence, il aurait été tentant de distribuer des jeux à tous les élèves, et l’inefficacité de cette mesure n’aurait jamais été reconnue.

Quelques projets en cours …

Chez les bébés

Pour connaître nos études en cours, c’est par ici 

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Chez les enfants

Projet “école et cerveau”

Le projet s’inscrit dans le programme « Un violon dans mon école » porté par la fondation Vareille qui a pour but d’évaluer scientifiquement dans quelle mesure l’apprentissage d’un instrument de musique, en l’occurrence le violon, dès la maternelle, peut contribuer à l’épanouissement des enfants.

Le projet scientifiquement porté par NeuroSpin vise à étudier l’influence de cette pratique sur le cerveau de l’enfant. Plus précisément, nous souhaitons évaluer, au cours des années du CP et du CE1, les modifications anatomiques et fonctionnelles engendrées par une éducation musicale et une pratique du violon initiée dès l’âge de 4 ans.

Nous souhaitons particulièrement étudier l’éventuel transfert des effets de la pratique du violon à des domaines distants tels que les réseaux cérébraux du langage parlé, de la lecture, des mathématiques, et de l’attention. En effet, comme tout autre apprentissage, celui d’un instrument de musique, laisse son empreinte et marque profondément le cerveau de l’humain. La principale question est donc d’identifier cette empreinte neuronale, et de savoir si la musique peut avoir également un impact sur d’autres circuits neuronaux que ceux directement concernés par la musique.

Nous ambitionnons donc réaliser des expériences d’imagerie cérébrale chez 60 élèves qui seront en classe de CP à la rentrée scolaire de 2022-2023. La moitié des 60 élèves aura reçu une éducation musicale et aura pratiqué le violon de façon hebdomadaire, tandis que l’autre, bien appariée sur tous les plans, n’auront pas reçu une telle éducation. Ces expériences mesureront spécifiquement l’activité cérébrale des réseaux neuronaux des différents domaines cités auparavant : les réseaux neuronaux du langage parlé et oral, de la lecture, des mathématiques et de l’attention.

Projet “les oiseaux compteurs”

Le projet des Oiseaux Compteurs s’inscrit dans la continuité du projet Bien Joué été 2021. Il a pour vocation de tester si la distribution d’un jeu de cartes en début de CP et la pratique régulière de ce jeu en classe permet aux élèves de progresser davantage en mathématiques.

Le ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports a lancé cette opération en Novembre 2021: « Une opération ludique au service des apprentissages mathématiques ». Le jeu de cartes les Oiseaux compteurs, illustré par l’artiste Charlotte Gastaut, a été conçu par les services de la Direction Générale de l’Enseignement Scolaire (DGESCO) du ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports, avec le conseil et l’expertise du Conseil Scientifique de l’Éducation Nationale (CSEN). Près de 4 200 enseignants se sont portés volontaires pour faire pratiquer à leurs élèves de CP ces 8 jeux de cartes. Comme pour le projet Bien Joué, les classes ont été réparties aléatoirement entre classes expérimentales (avec jeux) et classes témoin (sans jeux).

Les classes du groupe expérimental ont pu mettre en place les jeux en s’appuyant sur les ressources éditées par la DGESCO et le CSEN et disponibles sur la page Eduscol du projet. Tout comme pour le projet Bien Joué, les progrès des élèves seront évalués grâce aux évaluations nationales (programme EvalAide) et à un questionnaire. La comparaison rigoureuse des résultats entre les deux groupes permettra de mesurer l’impact d’un tel dispositif.

Aujourd’hui, les élèves ont déjà passé les évaluations nationales de début de CP, celles de mi-CP et les questionnaires. Les évaluations nationales de début de CE1 auront lieu en Septembre 2022. Les premiers résultats de cette étude sont attendus pour le premier trimestre de l’année 2023.

Les petits plus à découvrir

La Conférence internationale sur le sommeil : « mieux dormir pour mieux apprendre »

Une conférence internationale sur le sommeil a été organisée le 23/03/2022 par le conseil Scientifique de l’Education Nationale (CSEN). Vous pourrez retrouver l’intégralité de la conférence en replay et/ou lire la note de synthèse qui rassemble les dernières données de la recherche et les recommandations.

Retrouvez aussi de nouvelles ressources sur la page dédiée au sommeil sur notre site internet moncerveauàlecole.

Colloque « L’enfant, la nature et le vivant »

Un colloque sur « l’enfant, la nature, le vivant »  organisé par les étudiants en master en psychologie du développement de l’Université de Nanterre s’est déroulé le mercredi 8 juin dernier à la Cité des Sciences et de l’Industrie. Vous pouvez le revoir en replay.

Comment améliorer le bien être à l’école

Voici un livre avec 70 propositions pour améliorer l’école : “Et si l’enfant était au coeur?“, co-publication (Gaël Le Bohec, député de la commission de l’éducation, François Taddei, le directeur du Learning Planet Institute, Sarah El Hairy la ministre de la jeunesse et engagement, Pauline Martinot, thésarde au sein du NeuroKidsLab.

https://editionspo.fr/livre/copie-de-b-progressisme-b-br-i-la-renaissance-d-une-idee-en-politique-i

Contact NEUROKIDSLAB

*** LE NEUROKIDSLAB RECRUTE ***

Nous avons encore et toujours besoin de nos chers petits collaborateurs donc n’hésitez pas à venir participer à nos études et à parler de nos recherches autour de vous !

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